Mardi 15ème semaine du T.O.
Mardi, 12 Juillet 2022
Les Œuvres du Saint-Esprit de RUPERT DE DEUTZ
Job ouvrit la bouche et maudit le jour de sa naissance en ces termes : “Périsse le jour où je suis né, et la nuit où l'on a dit : Un homme est conçu !”.
Ce jour de sa naissance, cette nuit de sa conception qu'il appartenait au sage de maudire, ce fut le péché du premier homme : jour au sens ironique, mais en réalité, nuit. Car dans ce soi-disant jour, le séducteur promettait que nos yeux s'ouvriraient, disant : “Mangez et vous serez comme des dieux !”. Mais dès qu'on le crut, un mur d'inimitié se dressa entre Dieu et nous, et ainsi nous fûmes conçus pour le malheur, dans la nuit, c'est-à-dire incapables de voir Dieu. C'est ce jour, ou plutôt cette nuit, que maudirent de tout leur pouvoir Job, et tous ceux qui depuis l'origine du monde, détestèrent ce péché du diable et soupirèrent après la justice de Dieu. Mais la malédiction d'aucun d'eux ne put le bannir efficacement. Le Christ seul put maudire infailliblement le péché au point de le proscrire, selon la parole de l'Apôtre : “Dieu, envoyant son Fils en vue du péché, a condamné le péché dans la chair”.
Mais le Christ est-il né, lui aussi, en ce jour de péché, fut-il conçu dans cette nuit de malheur ? Parfaitement, il naquit en ce jour, fut conçu en cette nuit. Mais elle fut toute autre la naissance et la conception du vieil homme et celle du nouveau. Pour Adam qui était homme et heureux, cette naissance ou conception consista à devenir pécheur et malheureux. Pour le Christ au contraire, qui était Dieu, hors d'atteinte de la souffrance et de la mort, elle consista à devenir homme sujet à la souffrance.
C'est ici le lieu de la Sagesse ; c'est ici qu'il faut être attentif à ce que suggère l'Esprit de Sagesse. Voici en effet, que l'Homme-Christ, l'Homme-Juste, doit beaucoup aux hommes pécheurs. Que se fortifient les mains languissantes et que les genoux chancelants des pécheurs s'affermissent : car s'ils sont instruits dans la foi et la piété, s'ils sont de sages avocats, ils ont de quoi lier les mains de leur juge.
En effet, si celui-ci leur dit : “C'est à cause de votre jour de péché que je suis né, à cause de votre nuit perverse que j'ai été conçu : moi qui étais Dieu immortel, je me suis fait homme mortel”. Que les pécheurs croyants, que les pécheurs pénitents lui répondent : “C'est vrai, nous te devons beaucoup, Christ-Dieu, pour t'être fait homme. Mais à l'inverse, toi aussi, tu nous dois beaucoup, Christ-Homme, car c'est à cause de nous que ta nature humaine a été assumée par Dieu". Si nous n’avions pas été pécheurs, il n’y aurait aucune raison que tu aies été ainsi assumé.
Que cette pensée nous encourage ; ne nous contentons pas de considérer tout ce qu'a souffert un si grand Seigneur pour les fautes d’esclaves si indignes : tant d’injures et la mort même, la mort de la croix. Mais souvenons-nous aussi que si les serviteurs n'avaient pas péché, la nature de serviteur n'aurait pas été assumée par la personne du Seigneur Dieu. Car le Seigneur a reçu de la méchanceté de ses serviteurs plus de gloire que d'infamie. S'il a été suspendu à la croix pour eux, c'est pour eux aussi, pour intercéder en leur faveur, qu'il trône maintenant à la droite de Dieu.
Lecture d'un autre jour à partir du calendrier liturgique...